Pas d'honoraires pour l'agent immobilier !

By décembre 05, 2023

La Cour de cassation, dans un important arrêt du 1ᵉʳ juillet 2020, refuse de constater la faute des mandants de l'agent immobilier (l'un en qualité d'acquéreur en vertu d'un mandat de recherche, l'autre en qualité de vendeur, en vertu d'un mandat de vente), ayant conclu la vente en dehors desdits mandats (Cass., Civ. 1ʳᵉ, 1ᵉʳ juillet 2020, n° 19-10.285).  


En l'espèce, une société propriétaire d'un entrepôt mandate un agent immobilier de la vente de ce bien.  Trois mois plus tard, un acheteur donne à ce même agent immobilier, un mandat de recherche d'un bien immobilier.

 

Le mandat de recherche contenait une clause stipulant qu'en cas de réalisation d'une vente, les honoraires de l'agent immobilier seraient à la charge exclusive de l'acquéreur. 

 

Le mandant en recherche de biens, régularise une reconnaissance d'honoraires au profit de l'agent immobilier, portant sur un montant de 40.800€ au titre de l'acquisition de l'entrepôt.

 

Une promesse synallagmatique de vente a été conclue par l'intermédiaire de l'agent immobilier, stipulant à titre de condition suspensive, l'obtention d'un permis de construire au plus tard cinq mois avant la conclusion de l'avant-contrat.

 

Cette condition suspensive n'ayant pas été réalisée dans le délai stipulé, l'acquéreur a notifié à l'agent immobilier la défaillance de cette dernière, et en conséquence, la caducité de la promesse.

 

Cela étant, trois mois après l’échec de cette vente, une société ayant pour gérant l’acquéreur (la personne ayant conclu le mandat de recherche avec l’agent immobilier), a fait l’acquisition de l’ensemble des parts sociales de la société venderesse, lui permettant, in fine, de devenir propriétaire de l’entrepôt dont la vente avait été confié antérieurement à l’agent immobilier.

 

Constatant l’intervention de cette vente, l’agent immobilier a engagé une procédure en paiement de ses honoraires, à l’encontre du vendeur et de l’acheteur.

 

À hauteur d’appel, la Cour a condamné solidairement l’acheteur et le vendeur au paiement de la somme de 40.080 euros à titre de dommages et intérêts, sur le fondement de la responsabilité contractuelle, au motif que « la non-réitération de la vente par acte authentique résulte d’un accord des parties qui se sont rapprochées pour parvenir à la cession des parts sociales de la société venderesse à la société gérée par l’acheteur », de sorte qu’elles ont commis une faute de nature à engager leur responsabilité à l’égard du mandataire en s'étant entendues pour éluder les droits de ce dernier en ne concluant pas la vente initialement projetée, mais une cession d’actions, aboutissant, in fine, à l’acquisition du bien.

 

L’acquéreur et le vendeur se sont pourvus en cassation, critiquant la solution adoptée par la Cour d’appel, aux motifs :

  • Que l’agent immobilier n’a droit à aucune rémunération pour quelque motif que ce soit, au titre d’une opération qui n’a pas été effectivement conclue.
  • Que l’agent immobilier n’est pas fondé à engager la responsabilité contractuelle des parties, dès lors que l’échec de la vente ne résulte pas d’une entente entre les parties, mais de la caducité de la promesse, faisant suite à la défaillance de la condition suspensive.

 

La Haute juridiction fait droit à l’argumentation du vendeur et l’acquéreur, en retenant qu’aucune faute de ces derniers n’était en l’espèce caractérisée, de sorte que leur responsabilité contractuelle ne saurait être engagée.

 

En effet, la Cour considère que la conclusion d’une cession de la totalité des parts sociales d’une société, quand bien même celle-ci emporte cession de bien immobilier, n’est pas constitutive d’une faute des mandants, susceptibles d’engager leur responsabilité contractuelle.

dernière modification le mercredi, 06 décembre 2023 13:39