Locataire vs propriétaire : le propriétaire en garde à vue !

By mars 20, 2024

Une nouvelle illustration du régime de faveur français dont bénéficient les mauvais payeurs et squatteurs : Richard, propriétaire d’un appartement sur la promenade des Anglais, loue son appartement moyennant un loyer fixé à 2.000€, conformément au bail conclu le 10 février 2024.

Face à l’absence de paiement d’une quelconque somme au titre du loyer, le bailleur décide de ne pas en rester là. Il aurait ainsi décidé de confier le soin à un individu payé 100€ de l’expulser.

Si le locataire est effectivement en tort en ce qu’il ne s’acquitte pas des loyers dus conformément au bail (article 7 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989), le propriétaire n’a néanmoins aucun droit de se faire justice lui-même.

 


RAPPEL

L’article 226-4-2 du Code pénal prévoit que « Le fait de forcer un tiers à quitter le lieu qu'il habite sans avoir obtenu le concours de l'Etat dans les conditions prévues à l'article L. 153-1 du code des procédures civiles d'exécution, à l'aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contraintes, est puni de trois ans d'emprisonnement et de 30 000 € d'amende. »

Autrement formulé, un bailleur qui contraint son locataire à quitter son bien immobilier en dehors des procédures légales prévues à cet effet, s’expose à une peine d’emprisonnement de trois ans et d’une amende de 30.000€.


 

Revenons-en à nos moutons. Richard aurait donc pris l’initiative de sous-traiter la délicate tâche d’expulser de son logement son locataire mauvais payeur, moyennant une somme de 100€.

Mal lui en prit. En effet, le locataire ayant contacté les forces de l’ordre, ces dernières se sont rendues sur place afin de mettre cette affaire au clair.

Il en a résulté une garde-à-vue de 48 heures pour le bailleur indélicat.

 

Juridiquement, rappelons tout de même qu’en l’occurrence, l’occupant dispose de la qualité de locataire, dès lors qu’il est pris possession des locaux aux termes d’un bail. Il n’est ainsi pas qualifié de « squatteur », mais bien de locataire.

Cette distinction est essentielle. C’est elle qui détermine le régime juridique applicable à une action tendant à voir l’occupant expulsé du logement.

 

 


EXPULSION DU LOCATAIRE

Lorsqu’il s’agit d’un locataire, la procédure d’expulsion est comme chacun le sait, longue et coûteuse. L’article L.411-1 du Code des procédures civiles d’exécution soumet une telle expulsion à l’obtention préalable d’une décision de justice, ou d’un procès-verbal de conciliation exécutoire après signification d’un commandement d’avoir à libérer les locaux.

Dans les faits, entre la lenteur de la justice et la bienveillance des magistrats (accordant des délais de paiement), un locataire peut facilement rester 24 mois dans un logement avant d’aboutir à une décision d’expulsion. Cela est notamment dû à la difficulté de relogement de ces individus.

 

Rappelons qu'aucune expulsion ne peut avoir lieu durant la période de trêve hivernale, s'étendant du 1ᵉʳ novembre au 31 mars… Espérons que la pertinence de cette mesure soit réévaluée au regard du phénomène du réchauffement climatique…

 


EXPULSION DU SQUATTEUR

Dans l’hypothèse où un individu pénètre de manière non autorisée dans votre logement, et y établi sa résidence, nous sommes en présence d’un squatteur.

 

Cette situation doit vous amener à réagir dès la prise de connaissance de la situation, afin mettre en place la « procédure accélérée » applicable en matière de squat. Il vous reviendra alors de :

  • Porter plainte pour violation de domicile au commissariat de police ou à la gendarmerie ;
  • Prouver que le logement est bien votre propriété (titre de propriété, factures, documents fiscaux, attestation de voisinage, …) ;
  • Faire constater par un officier de police judiciaire, le maire ou un commissaire de justice (huissier de justice), que le logement est squatté.

 

Une fois ce schéma suivi, vous devez solliciter du préfet de votre département qu’il mette en demeure le squatteur de quitter le logement. Le préfet doit rendre sa décision dans un délai de 48 heures (une décision de refus sera contestable devant la juridiction administrative).

Si le préfet fait droit à votre demande en adressant une mise ne demeure au squatteur, ce dernier dispose d’un délai d’un minimum de 24h00 pour quitter le logement.

Enfin, si les squatteurs ne libèrent pas les lieux malgré la mise en demeure du préfet, celui-ci doit faire évacuer le logement sans délai par la force publique.

Précision essentielle : la trêve hivernale ne s’applique pas cette procédure.

 

 

dernière modification le mercredi, 20 mars 2024 09:06